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    - Projet Marina : Idéal

    - Terry : Les rue parallèles

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  • Interview de Pierre Mikaïloff, pour la sortie de de son recueil de nouvelles "Terminus Las Vegas".

    22 novembre 2016, Le Pop In. Par Baptiste et Gérald PETITJEAN.

    Interview de Pierre Mikaïloff, pour la sortie de "Terminus Las Vegas"

    Pierre Mikaïloff, guitariste du groupe Les Désaxés puis de Jacno, auteur de romans et de biographies (Serge Gainsbourg, Françoise Hardy, Alain Bashung, …), vient de publier « Terminus Las Vegas », un recueil de nouvelles, aux éditions Paul & Mike. Las Vegas y est un mirage construit par des mafieux, un mensonge perdu dans le désert, un cauchemar pour des losers en fin de parcours, une porte des enfers qui fait se croiser fantômes de rock stars et rock stars fantomatiques. Dans ce Las Vegas, les humains sont fatigués. Les démons sont trop humains. Les rock stars ont perdu leurs pouvoirs et ressemblent à d’anciennes divinités déchues. Comme si les Grands Anciens de Lovecraft avaient forcé sur la bouteille et atterri dans "American Gods" de Neil Gaiman. Terminus Las Vegas, tout le monde descend, pas la peine de prendre un billet de retour.

    Recontre avec Pierre Mikaïloff, qui nous parle de son Las Vegas et de ses personnages. Et, en bonus, une playlist à écouter en lisant « Terminus Las Vegas » !

    Baptiste & Gérald : Tu as démarré comme musicien, guitariste au sein du groupe Les Désaxés puis pour Jacno, et ensuite tu es passé à l’écriture. Essais, biographies, romans, journalisme, … Pourquoi cette évolution ?

    Pierre Mikaïloff : Je suis passé de la musique à l’écriture sans passer par la case journalisme, mais par la case « petits boulots » aux débuts des années 2000. Mon premier livre était un recueil de nouvelles, « Some clichés : une enquête sur la disparition du rock’n roll ». De là, on m’a proposé d’autres projets : Patrick Eudeline m’a contacté pour écrire le « Dictionnaire raisonné du punk », Philippe Manœuvre m’a proposé d’écrire des papiers dans Rock’n Folk. C’était en 2006. Et depuis, ça n’a pas arrêté.

    B&G : Il y a d’ailleurs toujours un fonds de musique dans ton travail d’écrivain.

    PM : Oui, la musique et le rock en particulier sont toujours présents car c’est ce qui m’a ouvert au monde. Je n’ai pas été poussé par une soudaine envie d’écrire. En fait, l’envie était là depuis très longtemps, depuis mon enfance, avant même que je ne fasse de la musique. Mais je ne savais pas comment l’aborder. À l'adolescence, monter un groupe a été plus simple, plus direct, plus spontané. Il y avait aussi la motivation collective d’être avec des potes et de jouer de la musique. Alors que pour l’écriture, on se retrouve seul, assis devant son ordinateur. Il a donc fallu attendre que je fasse moins de musique pour me mettre vraiment à l’écriture. Les plans que j’avais en tant que musicien étaient plutôt foireux, j’avais par exemple beaucoup travaillé sur une BO de long-métrage et le film a mis très longtemps à sortir. Ça m’avait découragé et un peu dégoûté de la musique. C’était le bon moment pour passer à l’écriture.

    B&G : Récemment, tu as publié beaucoup de biographies. Avec « Terminus Las Vegas », tu repasses à la fiction. C’est un choix d’alterner ? Au gré de tes envies ?

    PM : Ce n’est jamais vraiment un choix. Pour les biographies et les essais, il y a des propositions, qu’on accepte ou qu’on refuse. Au départ, je souhaitais faire uniquement de la fiction mais je voulais aussi vivre de l’écriture. Donc j’ai accepté des ouvrages « alimentaires » qui me plaisaient et qui m’intéressaient, sur le punk, sur Taxi Girl, sur Françoise Hardy, sur Jane Birkin, sur Alain Bashung… Si je me suis détourné de la fiction, c’était avant tout un concours de circonstances, et non un choix. Mais j’ai toujours continué à écrire de la fiction : des nouvelles publiées dans des ouvrages collectifs sur les Doors ou les Ramones, et aussi deux romans.

    B&G : On va revenir sur « Terminus Las Vegas ». C’est un recueil de nouvelles, qui ne se déroulent d’ailleurs pas toutes à Las Vegas. C’est plus un esprit et une ambiance autour de Las Vegas.

    PM : En fait, Las Vegas, c’est un fantasme, ça peut être n’importe où. C’est un rêve de losers, de paumés, de personnages qui au début de l’histoire sont mal partis et qui, à la fin, sont encore plus mal en point… Las Vegas, c’est aussi une ville très graphique, très cinématographique, qui se prête à l’imaginaire, avec ses néons, ses casinos, son faux Venise, son faux Paris, avec une débauche de moyens. La ville est aussi un vrai décor de rock’n’roll : Elvis y a fait son come-back scénique, les Stones y ont joué cette année.

    B&G : Dans tes nouvelles, la plupart des protagonistes pensent que Las Vegas est un rêve et une oasis. Mais, c’est plutôt un cauchemar et un mirage.

    PM : Oui. Las Vegas pourrait être un mirage : c’est une ville construite de toutes pièces dans le désert par la mafia, après la seconde guerre mondiale. Et il se pourrait qu’un voyageur, en arrivant à son but, s’aperçoive qu’il n’y a rien, que Las Vegas n’existe pas, qu’il ne reste que le lit d’un ruisseau asséché. Mes personnages n’atteignent jamais Las Vegas ou, quand ils l’atteignent, se rendent compte que la ville ne va pas renverser leur situation. C’est le cas du rocker déjanté et paranoïaque qui rêve de faire un come-back à la Elvis dans un casino détruit depuis longtemps.

    B&G : Dans la dernière nouvelle, tu fais d’ailleurs apparaître un mafieux qui tient la ville.

    PM : Oui, il y a un vrai mafieux qui possède un casino. Mais, dans cette nouvelle, il y d’autres personnages encore plus dangereux et inquiétants que les mafieux, des personnages surnaturels qui viennent d’un autre univers.

    B&G : Ces personnages surnaturels sont pourtant plus humains que les humains.

    PM : De toute façon, les spectres, avant d’avoir été des spectres, ont été des êtres humains. Donc ils doivent garder une part d’humanité.

    B&G : Les vrais humains ont parfois l’air de zombies. Et les personnages surnaturels sont aussi des losers. C’est une réunion décalée de zombies et de succubes.

    PM : J’ai un peu réuni tous les types de personnages que j’aime, à la sauce rock’n roll. Par exemple les succubes et les incubes, qui viennent de mes lectures de Huysmans. J’aime bien quand les univers se rencontrent, quand le fantastique fait irruption dans le réel, quand le réel est au bord du fantastique, quand les frontières s’estompent.

    B&G : Les légendes du rock qui traversent tes nouvelles ressemblent un peu à des fantômes surgis du passé. On devine ou on croise les fantômes d’Elvis, des Stones, de Janis Joplin. Cela rappelle des papiers que tu avais écrits pour Gonzaï, dans lesquels tu interviewais des stars du rock prétendument mortes mais qui, en fait, auraient changé de vie et vivraient dans l’anonymat. Un Jim Morrison devenu colonel en retraite, un Elvis vivant dans une caravane en Corrèze, une Janis Joplin qui tient une baraque à frites.

    PM : Il y a énormément de rock stars qui ont disparu très jeunes. Donc on se pose forcément des questions du genre « What if ? ». Si elles avaient vécu, que se serait-il passé ? Où vivraient-elles aujourd’hui ? Qu’auraient-elles fait à 50 ans ? A 70 ans ? A 80 ans ? Comme je les aime bien, je leur invente parfois un avenir. Dans les récits de Gonzaï, je partais du principe que ces rock stars disparues étaient vivantes, et qu’elles menaient une vie tranquille qui n’avait plus rien à voir avec le rock’n’roll, qu’elles avaient changé d’identité. Et j’avais inventé un journaliste qui partait à leur recherche. Dans "Terminus Las Vegas", il y a le fantôme d’Elvis qui tient un rôle important dans une nouvelle. Il y a aussi les Rolling Stones. Eux ne sont pas des fantômes, ils sont bien vivants. Enfin… à peu près. Mais ils n’auraient pas réussi à passer les années 80 avec succès, ils seraient devenus des intermittents du spectacle, vivotant en enregistrant des publicités destinées aux séniors.

    B&G : Dans toutes tes nouvelles, il y a ce côté univers parallèle.

    PM : J’aime bien jouer avec cette idée-là, avec les uchronies, faire prendre à l’histoire un mauvais virage. C’est le cas dans la nouvelle avec les Rolling Stones.

    B&G : La première nouvelle est assez intéressante dans sa construction. Elle raconte l’histoire de la chanson Me and Bobby McGee de Kris Kristofferson, à travers les souvenirs, plus ou moins cohérents, de personnes qui ont contribué ou qui ont assisté, de près ou de très loin, à sa création.

    PM : On connaît surtout la version de Janis Joplin. Dans cette nouvelle, j’ai imaginé comment Kris Kristofferson a écrit cette chanson en allant, un jour, dans un bar situé dans une ville ouvrière, comment il a rencontré un poivrot, et comment ce poivrot lui a raconté son histoire. Au milieu de cette histoire que déroule ce poivrot, qui est le vrai amoureux de Bobby, je fais intervenir les témoignages de tous les gens qui ont interprété cette chanson, Jerry Lee Lewis ou Merle Haggard par exemple. Et puis aussi les témoignages de personnes qui n’ont rien à voir avec cette chanson, comme John Edgar Hoover, patron du FBI à l’époque, ou encore Abbie Hoffman, un révolutionnaire important des années 60. Tous ont une lecture de la chanson qui dépasse largement son sens : pour Hoover, elle a un sens caché subversif ; pour Hoffman, la chanson est un appel à la révolution car Bobby porte un bandana rouge. Je m’amuse à jouer avec le texte de la chanson.

    B&G : De nombreux personnages, visibles ou invisibles, sont de grandes figures du rock. Tu les as choisis pour une raison particulière, parce que ce sont des musiciens que tu apprécies ? Elvis, par exemple, est un personnage central du recueil de nouvelles, même si on ne le voit jamais. Il est à la fois caché et omniprésent.

    PM : Elvis est au cœur des nouvelles car c’est lui qu’on cherche. Et quitte à passer du temps avec des personnages, autant que ce soit avec des gens que j’aime. Elvis, Jerry Lee Lewis, les Stones, Janis Joplin, ou encore Kris Kristofferson, font partie de mon univers, au même titre que les bandes dessinées que j’ai lues quand j’étais enfant. J’ai grandi avec eux, ce sont des personnages qui m’ont construit et qui m’accompagnent toujours. Ça m’amuse de les utiliser comme des personnages de nouvelles.

    B&G : Il y a aussi des personnages connus qui ne sont pas issus du rock, dont un Francis Ford Coppola alternatif. C’est un cinéaste qui t’a marqué ?

    PM : C’est un cinéaste que j’adore. Même si je n’aime pas tout ce qu’il a fait. « Apocalypse Now » est un de mes 10 films fétiches. Dans la nouvelle concernée, j’ai un peu repris le principe de « L’homme qui tua Liberty Valance » de John Ford : l’homme à qui on attribue un exploit, un succès, est un imposteur. Là, j’ai inventé un scénariste de l’ombre qui aurait écrit « Apocalypse Now » et un très méchant Coppola qui lui aurait volé son scénario.

    B&G : Tu montres un jeune Coppola, étudiant complètement désinvolte, qui ne pense qu’à parler des filles sur son campus, avec des ambitions cinématographiques très médiocres.

    PM : Oui. Coppola est  devenu un monstre sacré du cinéma mais je me base sur un fait réel : il a démarré en tournant des séries B pour Roger Corman, avec des budgets dérisoires. C’est pour cela que, dans la nouvelle, il travaille pour Corman et veut ajouter au scénario des filles à poil et des extra-terrestres. C’est, selon lui, ce qui attire le public en salle.

    B&G : C’est assez marrant d’avoir cette vision d’un Coppola réalisateur de nanards, très éloignée de son image.

    PM : Oui, j’aime bien égratigner les icônes, déboulonner les idoles. Surtout quand les personnages deviennent trop consensuels, quand ils font trop l’unanimité, même si ce n’est pas de leur faute.

    B&G : Dans la dernière nouvelle, tu fais intervenir Lovecraft, auteur de récits fantastiques, et Lester Bangs, journaliste musical. Ce sont tes maîtres littéraires ?

    PM : Ça m’arrangeait de les utiliser car ils sont morts et que j’avais besoin de personnages morts. Lovecraft, je l’ai beaucoup lu quand j’étais adolescent. Je ne l’ai pas relu depuis longtemps, mais il est resté très important pour moi. Quant à Lester Bangs, je l’ai découvert comme beaucoup de Français dans les années 90, quand ses textes ont été publiés aux éditions Tristram. Le personnage est devenu vraiment attachant lorsque j’ai lu la biographie que lui a consacrée un de ses amis. C’est un très bon écrivain, très drôle, un très fin analyste musical, au mode de vie pour le moins chaotique. Le petit fantasme que j’avais, c’était de me faire interviewer par le fantôme de Lester Bangs. C’est le point de départ de la nouvelle.

    B&G : Dans cette nouvelle, il y a beaucoup de personnages qui se croisent.

    PM : Oui, j’aime bien les scènes finales des comédies américaines, dans lesquelles tout le monde se retrouve, les fins à la Mel Brooks !

    B&G : Ramon Diaz, le personnage mexicain qui veut réussir à Hollywood, apparaît dans deux nouvelles, dont la dernière. Il fait penser au mythe de Sisyphe : on a l’impression qu’il est voué à tenter éternellement sa chance à Hollywood et à éternellement échouer à Las Vegas.

    PM : C’est bien observé. Il s’agit d’un gars qui n’a pas capitulé mais ça ne veut pas dire qu’il va réussir. Il a même très peu de chances d’y arriver.

    B&G : Étant donné que nous allons publier sur cette interview sur un blog musical, pourrais-tu nous donner une playlist 100% Las Vegas ?

    PM : - Kris Kristofferson : Me and Bobby McGee
            - The Rolling stones : Time waits for no one
            - Hank Williams III : My drinking problem
            - Dave and Phil Alvin : Stuff they call money
            - The Clash : Brand new Cadillac
            - Elvis Presley : Too much monkey business
            - Tony Joe White : Tell me a swamp story
            - Ian McLagan : How blue
            - Jim Ford : Spoonful

            - Richmond Fontaine : Let's hit one more place
            - Julie London : You'd be so nice to come to
            - Steve Miller Band : Living in the USA

    Pour suivre les actualités de Pierre Mikaïloff et obtenir d'autres informations sur “Terminus Las Vegas” :
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  • Interview de Mamfredos.
    9 octobre 2016, Francis Labutte (122 rue Caulaincourt - 75018 PARIS).
    Par Baptiste et Gérald PETITJEAN.

    Rencontre avec Mamfredos, talentueuse multi-instrumentiste et férue de jazz, qui vient de sortir son premier EP "Changement de saison".

    Interview de Mamfredos, 9 octobre 2016

    Baptiste & Gérald : Peux-tu nous parler de ton parcours ? De ta première approche de la musique ?
    Mamfredos : J'ai baigné dans la musique. Avec des parents et une grand-mère maternelle fous de jazz, qui est vraiment la base de ma culture musicale. Ma grand-mère m'a amenée dès l'âge de huit ans au festival de jazz de Juan-les-Pins. Après, ma mère m'a fait découvrir d'autres artistes, comme Boby Lapointe …

    B&G : Quels sont les artistes et les disques de jazz qui t’ont influencée ?
    M : Il y en a un sacré paquet ! J’aime bien les formations classiques : piano, contrebasse, batterie. « Kind of Blue » de Miles Davis, un disque de référence. C'est pour moi un disque merveilleux, rien à ajouter, rien à enlever. S’il y avait un disque parfait ... J’ai un autre disque de chevet, qui a largement contribué à mon envie de faire de la musique : « Piccolo » de Ron Carter. J’ai aussi été impressionnée par Marcus Miller en concert. Quand j’allais au festival de Juan-les-Pins, j’étais frappée par le fait que ces gars-là ne s’arrêtent jamais : dès qu’ils sortaient de scène, ils filaient faire des jam sessions. D’ailleurs, dans un bar, j’ai pu voir Marcus Miller au piano et Roy Hargrove à la trompette. Ils ont joué pendant deux heures. Il n’y avait personne mais ils s’éclataient.

    B&G : Quels sont les concerts qui t'ont marquée quand tu étais petite ?
    M : Keith Jarrett en trio, avec Gary Peacock et Jack DeJohnette. J’ai dû les voir une dizaine de fois. Dans un autre style, je me souviens d'un concert de Massive Attack, toujours à Juan-les-Pins. Je devais avoir environ onze ans Et, ce qui est fou, c'est que je me suis retrouvée dans les loges avec le groupe, grâce à une pote de l'époque. On a mangé des concombres et des carottes avec eux ! C'était très cool, même si je ne parlais pas un mot d'anglais. Ana Popovic, une guitariste et chanteuse de blues, une sorte de Jimi Hendrix au féminin, m'a aussi beaucoup impressionnée : gamine, je ne pensais pas que c'était possible qu'une fille ultra sexy puisse jouer aussi bien de la gratte. A l'époque, je démarrais la guitare et ça a été un vrai déclic. Ma grand-mère avait réussi à obtenir un autographe de cette fille car elle avait compris que c'était important pour moi. C'est le seul autographe que j'ai. Et je ne sais pas où il est passé …

    B&G : Tu as donc démarré la musique avec la guitare ?
    M : Oui, des amies, qui étaient mes voisines, s’y étaient mises et j'ai eu envie de m'y mettre aussi. Ça m'a plu et je me suis lancée à fond.

    B&G : Tu as commencé tout de suite à écrire tes propres morceaux ?
    M : J'ai commencé à composer quand je prenais des cours de guitare avec un super prof, Cyrille Jakob. Je ne prenais qu’une heure de cours par semaine, mais on débordait souvent car on s’entendait super bien. On est devenus amis. Le cours était divisé en deux : d’abord on travaillait la rythmique, puis les techniques de solo à la fin du cours. Quand je travaillais les morceaux, je me plantais : et en me trompant d’accord, je trouvais que ça sonnait bien quand même. C’est comme ça que je me suis mise à la composition.

    Interview de Mamfredos, 9 octobre 2016

    B&G : Tu as ensuite appris à jouer d’autres instruments ?
    M : J’ai commencé par demander une carte son à mon anniversaire, pour pouvoir m’enregistrer. J’ai tout de suite superposé plusieurs pistes de guitare. Et j’ai eu envie d’arranger. Donc, je me suis mise à la basse pour amener plus de soutien à mes morceaux. L’étape d’après, ça a été la batterie. Déjà quand j’étais petite, je déménageais les casseroles de la cuisine au salon pour taper dessus. Je crois que pour tous mes Noëls et mes anniversaires, j’ai demandé des instruments ou du matériel de musique. Je suis complètement autodidacte, je ne suis pas une grande batteuse, je fais juste des « poum tchak », mais je pense que ça suffit pour faire de bonnes chansons pop. Ensuite, je me suis mise aux claviers car j’avais récupéré le piano de mon père, un quart-de-queue. A l’époque, à 17 ans, j’enregistrais dans le studio de Grégori Czerkinsky, du groupe Mikado, et j’ai rencontré Julien Baer qui m’a montré comment transposer les accords de guitare au piano. Il m’a donné mes premières clés pour composer au piano. Ça m’a fait beaucoup de bien car ça m’a ouvert d’autres horizons, ça m’a permis de sortir de mes habitudes de composition à la guitare, de mes réflexes de guitariste… Et ça parlait à ma culture jazz : sur un piano c’est bien plus évident de plaquer des accords "jazz" … Et ça m’a éclatée de placer ces accords "jazz" dans mes arrangements pop. Le fait d’être multi-instrumentiste me permet de ne pas ennuyer les autres et d’être autonome pour composer et enregistrer.

    B&G : En parlant d’autonomie, tu enregistres chez toi à Provins ?
    M : Oui. En ce moment, je monte un studio d’enregistrement à Provins. C’est une vraie chance. Je suis très contente et très excitée de me lancer dans cette aventure.

    B&G : Tout à l’heure, on a parlé des concerts qui t’ont marquée. Comment te situes-tu au niveau du live ? Tu en as fait beaucoup ?
    M : J’en ai fait très peu. Mamfredos sur scène, c’est du tout neuf ! J’avais joué dans un loft quand j’avais sorti mon premier single, Didoudamour. Récemment, j’ai fait un concert à La Java. C’est Mélanie Bauer (Radio Nova, France Inter) qui m’a invitée à jouer dans une de ses soirées « Tube à Essai ». Je venais de sortir le single Circa, et mon premier EP allait sortir. Pour ce concert, j’étais accompagnée par Valentin Durup, qui joue avec Robi et La Canaille… On se connaît depuis longtemps, on a accompagné un ami ensemble. C’est toujours un plaisir de jouer avec Valentin, on se capte bien, ça va vite ! Et je viens de jouer aux Trois Baudets (le 3 octobre), en version solo : avec ma guitare, un ordi, une SPD et un petit clavier. J’ai re-travaillé les arrangements des chansons pour proposer des versions différentes par rapport à l’EP.

    B&G : Tu peux nous parler de ton premier EP, « Changement de Saison » ?
    M : Ça m’a pris beaucoup de temps. C’est mon premier bébé ! Certaines chansons sont assez anciennes. Elles me sortent parfois un peu par les trous de nez, j’ai envie de les remixer, de les réarranger, de les rechanter, de changer un mot, de les produire différemment (et puis maintenant je vais avoir le studio, le vrai gros son !)… Mais j’ai décidé de les sortir telles quelles parce qu’il faut savoir poser la plume et qu’elles me représentent bien : c’est moi et j’en suis fière, il n’y a pas de triche. Des chansons et des disques il y en aura beaucoup d’autres !

    B&G : Tu retravailles souvent tes chansons ?
    M : Ça dépend. Trop tard par exemple, je l’ai faite en une nuit. Et je n’ai quasiment rien retouché après.

    B&G : Comment procèdes-tu ? Tu écris d’abord la musique ou les paroles ?
    M : Ça évoluera peut être, mais pour l’instant, je commence par la musique, avec des boucles, souvent la nuit. Je mets une boite à rythme, je plaque des accords, je me mets quelques sons, des textures, pour me poser une ambiance. Au bout d’un moment, j’ai une phrase qui vient, je la répète, un peu comme une litanie, puis d’autres phrases arrivent et complètent la première… De fil en aiguille se dessinent un couplet, un refrain… Et ensuite, je retravaille les arrangements : j’ajoute une basse, je reviens sur la guitare car la basse a apporté quelque chose de nouveau, puis j’ajoute des cordes, et je reviens sur la guitare, j’enlève les cordes, je mets un synthé… Ça peut rendre assez dingue !

    B&G : Quand est-ce que tu as décidé d’écrire tes propres chansons et de sortir des disques ?
    M : J’étais à la fac et je travaillais comme musicienne pour d’autres chanteuses. C’est d’ailleurs comme cela que j’ai rencontré Grégori Czerkinsky. C’étaient des chanteuses-comédiennes qui parlaient/chantaient et ça m’a beaucoup appris pour la composition et l’arrangement, car il fallait leur construire des univers qui leur soit propres, qui leur correspondent, qu’elles puissent être à l’aise et balancer les mots comme elles le souhaitaient, et surtout que ce soit leur musique à elles. Au bout d’un moment, en les voyant chanter, je me suis aussi sentie capable de la faire. Et je me suis lancée. A la même époque, Helena Noguerra m’a encouragée. Je l’avais rencontrée sur MySpace. Quand je lui ai fait écouter mes bouts de morceaux (qui faisaient 30 à 40 secondes), elle a trouvé ça bien et m’a dit : « Ils sont bien tes morceaux. Pourquoi tu ne chantes pas dessus ? ». Et je me suis laissée prendre au jeu. Je me suis rendue compte que la voix, c’était un peu l’instrument ultime. Aujourd’hui je m’amuse beaucoup avec ma voix. J’aime bien chanter différemment d’une chanson à l’autre, essayer des textures ... C’est comme quand je choisis de jouer de telle ou telle guitare sur tel ou tel titre, c’est un feeling que je cherche …

    B&G : Tu as évoqué Grégori Czerkinsky de Mikado, et aussi Helena Noguerra, qui est la sœur de Lio. La chanson Circa et son clip font penser à Niagara. Ces artistes des années 80 sont des influences que tu revendiques ?
    M : En fait, je les ai découverts assez tard. On m’a aussi parlé de François de Roubaix. Mais je ne connaissais absolument pas quand j’ai commencé. J’écoutais presque uniquement du jazz. Pour Niagara, c’est marrant, vous n’êtes pas les premiers à me dire ça. Certaines personnes trouvent que j’ai une voix et des intonations qui font penser à Muriel Moreno.

    B&G : Ca te fait plaisir qu’on te compare à eux ?
    M : Ah oui ! Ils ont fait des super chansons, avec beaucoup de fraîcheur et de sincérité. C’est tout ce que j’aime. De la pop de qualité.

    B&G : Dans tes compositions, qui sont de la pop, tu arrives à intégrer tes influences jazz ?
    M : J’ai fait des études de médiation culturelle. Pour moi, ce qui est important, c’est que le plus grand monde ait accès à l’art. J’essaye de faire en sorte qu’à travers mes chansons pop, les gens trouvent des portes d’entrée vers le jazz et inversement (que les passionnés de jazz puissent se retrouver dans la pop). Keith Jarrett, même si je suis dingue de sa musique, ce n’est quand même pas très accessible à tous, le gars ne fait aucun effort pour que tu rentres dans son bordel. L’idée, dans ma musique, c’est d’introduire des éléments issus du jazz, de les cacher. Pour qu’un jour, une personne qui a écouté mes chansons et qui n’aime pas le jazz, arrive à accrocher quand il en entend, arrive à tendre l’oreille, que ça lui parle inconsciemment. Mon plaisir, c’est de faire des chansons simples en apparence, mais très travaillées, dans lesquelles plusieurs lectures sont possibles.

    B&G : A la sortie de ton EP, est-ce que certains avis t’ont étonnée ?
    M : J’ai été surprise par une critique, censée être négative, que je n’ai absolument pas comprise : ma musique serait « limite vulgaire ». Du coup, j’ai réécouté tout l’EP, pour être sûre ! Et je me suis tapé un fou rire pas piqué des hannetons !

    B&G : Quels sont les artistes que tu écoutes en ce moment ? Tu t’intéresses à d’autres univers musicaux ?
    M : Cette année, je suis allée aux Francofolies et j’ai été emballée par Keren Ann, Lou Doillon et Emily Loizeau, qui sont pourtant très éloignées de mon univers. Le concert de Keren Ann a été une grosse claque : elle a un sens de la mélodie et de l’arrangement assez incroyable, c’est une sacrée musicienne. Emily Loizeau fait des arrangements singuliers, très personnels : sur scène, elle dépote. Lou Doillon  je l’avais déjà vue lors de la tournée de son premier disque, et j’avais vachement aimé. Mais là, quelle évolution, ça défonce ! J’adorerais travailler avec ces trois filles, elles font leurs trucs, elles sont passionnées, sincères, et on sent que ce sont de sacrées bosseuses.

    B&G : Actuellement, tu travailles à temps plein dans la musique ?
    M : Oui, mais je ne gagne pas d’argent. C’est une des raisons pour lesquelles je suis partie de Paris pour aller vivre à Provins. La vie y est d’ailleurs plus agréable et moins stressante qu’à Paris. Et j’ai la chance d’avoir un papy et une maman qui font tout ce qu’ils peuvent pour me permettre de faire de la musique.

    B&G : On va terminer avec l’interview « Dernier coup ». Dernier coup de cœur ?
    M : Ma vie a été assez merdique ces derniers temps … Le disque « IV » de BadBadNotGood.

    B&G : Dernier coup de gueule ?
    M : Mes coups de gueule ne durent jamais plus de deux secondes. Ils existent mais ils ne comptent pas.

    B&G : Dernier coup de rouge ?
    M : Ce midi. Avant que vous arriviez ! Avec mon ami Thierry Cardot, qui est paysagiste. Il travaille avec ma mère, qui est architecte.

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